En effet, s’il n’a pas quitté l’ULB et La Hulpe pour la France, alors qu’il aurait pu largement concurrencer les jeunes Français de sa génération, Philippe Tollet a su poursuivre des études de médecine tout en participant à toutes les compétitions rugbystiques possibles en Belgique : rugby universitaire, équipe nationale à XV et à sept, équipe régionale du Brabant. Chirurgien réputé, il a ensuite rejoint Boitsfort où il a remporté de nombreux trophées, avant de présider le club et d’initier cette saison la BR Académie.
(Photo Sportkipik.be) |
Sans s’opposer à celui de Guillaume Piron, son témoignage enrichit la réflexion. On peut ainsi se demander si la Bofferding League est appauvrie par le départ des joueurs belges au regard des nombreux Français qui viennent étudier et jouer en Belgique chaque saison. La France est-elle aussi l’unique eldorado ? Question qui n’est pas strictement liée à la qualité de la formation française ou aux dernières performances du XV de France, mais aux autres destinations possibles toutes aussi valorisantes. Enfin, comme le suggérait également Bertrand Billi, dans l’Interview du Jeudi , n’est-il pas temps pour la Fédération de se saisir politiquement de la question ?
L’OPINION DE PHILIPPE TOLLET
"Avant toute chose, il est toujours bon de rappeler que le rugby n’est qu’un jeu, qu’un sport qui peut se pratiquer avec différents niveaux de passion en fonction des priorités de vie que l’on veut ou peut se donner.
Pour un jeune passionné de rugby, qui se voit même en finale de coupe du monde, l’aventure française, avec ses centres de formation de haut niveau, son Top 14 si médiatisé, le fait de fréquenter des joueurs tout simplement motivés, etc … semble la voie idéale pour concrétiser cette sorte de rêve éveillé …
Il est intéressant, par ailleurs, de faire remarquer que pendant que des dizaines de jeunes joueurs belges partent chaque année tenter leur chance dans les différentes filières de formation françaises, pas mal de rugbymen français, issus de ces centres, font le chemin en sens inverse vers la Belgique pour y accomplir des études dont l’accès est limité dans leur pays.
Maintenant comme le relevait le général McArthur, « la jeunesse est une victoire du goût de l’aventure sur l’amour du confort ! » et quand on analyse le parcours de Guillaume Piron et de Thomas Dienst, effectivement, on ne peut que l’apprécier avec des jeunes hommes qui ont parfaitement concilié leur passion du sport et la réussite de leurs études. Et comment ne pas admirer la carrière de Vincent Debaty ainsi que les débuts de Théo Millet en équipe de France à sept et à XV.
Malheureusement, pour la majorité des cas, ce voyage au « pays du rugby », se transforme souvent en un passage de vie décevant où l’individu est même parfois considéré comme une sorte de marchandise, voire de chair à canon noyé dans une masse d’autres joueurs issus également d’autres pays où la réussite rugbystique est la seule issue possible en terme de plan de survie professionnelle…
Nous avons l’impression qu’actuellement, les filières sont mieux contrôlées avec la plupart du temps une assurance sur la prise en charge locale en termes de logistique et de suivi des études.
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Néanmoins, devant cette situation préoccupante, surtout pour les parents qui voient leur fils s’en aller consacrer une bonne partie de sa jeunesse loin de chez eux, avec les aléas et les sacrifices exigés par un sport de haut niveau quel qu’il soit d’ailleurs, ne pourrions nous pas apporter quelques réflexions afin de proposer différentes alternatives à cet « exode français » ?
Tout d’abord, l’idée du centre de formation à Liège et des différentes académies qui ont vu le jour cette année est une opportunité intéressante pour associer une pratique du rugby quotidienne et un suivi scolaire adapté…
Par ailleurs, comme c’est la tendance actuellement dans certaines familles, d’envoyer après la dernière année des études secondaires les jeunes adultes dans un pays étranger, pourquoi ne pas y associer une inscription dans un collège ou une université anglo-saxonne voire argentine pour se perfectionner dans la langue locale tout en pratiquant un rugby de haut niveau ?
Proposer aux joueurs motivés des challenges sportifs intéressants et de qualité en Belgique tout en leur permettant de continuer leurs études ou leurs apprentissages avec des horaires adaptés serait une autre alternative.
A ce niveau, les possibilités sont immenses mais nécessitent une remise en question générale sur le fonctionnement actuel du championnat belge après les U16.
Cela passerait, selon moi, par une réflexion à propos de l’organisation des différentes compétitions accessibles grâce au rugby (championnat, coupe, rugby à sept, universitaire, coupe d’Europe à XV, sélections régionales, nationales,…) tout en gardant une ligne de conduite cohérente pour éviter toute concurrence entre celles-ci, situation dans laquelle, le joueur motivé se retrouve alors pris en otage.
En fait, le sujet de cet exode de nos joueurs belges devrait tout simplement faire partie d’un des thèmes de discussion sur l’établissement d’une vision à moyen terme du rugby belge qui permettrait à tous ses acteurs d’y voir plus clair, de se préparer tout en la proposant aux investisseurs afin de pouvoir concrétiser tous ces projets…"