Depuis plusieurs années, la Belgique ne cesse de monter dans les classements internationaux mais les dernières marches sont généralement très compliquées car la concurrence se resserre. En outre, le nombre de places pour ce premier Tournoi Olympique de rugby est limité à 12 équipes. Alors comment y arriver ? N’y a-t-il plus qu’un océan pour les Belges entre Lisbonne et Rio de Janeiro ? Faut-il oser professionnaliser un groupe comme d’autres pays ?

Pour répondre à ces questions, nous avons demandé son opinion à l’un des piliers du développement du Seven en Belgique : Neil Massinon. Ancien entraîneur de l’équipe nationale belge de 2006 à 2010, Neil Massinon est, depuis 2006, entraîneur des Belgium Barbarians 7s et, depuis 2012, entraîneur du Brussels 7s Development.


L’OPINION DE NEIL MASSINON

Il est illusoire de penser qu’une équipe est à même de se qualifier pour les Jeux Olympiques, sans être professionnelle, et ce sous le format actuel (douze qualifiés). Pour s’en rendre compte, il suffit de regarder les qualifiés actuels pour les prochain JO de Rio. Hormis le pays hôte (Brésil), qualifié d’office en tant que pays organisateur, toutes les nations présentes sont professionnelles. La dernière place qualificative, qui se jouera à Monaco, en juin 2016, devrait revenir, en toute logique, à une autre nation professionnelle, à savoir soit les Samoa, soit le Canada. Mais qui sait… D’ailleurs, le budget des All Blacks 7s a quant à lui, récemment doublé, passant d’un million à deux millions d’euros ! L’Irlande a également, de son côté, décidé de réinvestir dans le 7, alors qu’elle n’avait plus eu une équipe représentative depuis 2009. Ceci est dû à l’arrivée de cadres australiens qui pensent que l’équipe d’Irlande à 7 peut se qualifier pour les JO de 2020 mais aussi, développer certains joueurs et les intégrer au sein de l’équipe nationale d’Irlande à XV. Néanmoins, ces augmentations de budget, n’impliquent pas nécessairement un passage vers un statut professionnel. De nombreuses équipes, dans le deuxième tiers mondial, sont soit encore amateurs ou semi-professionnelles.


(Archive Sportkipik.be)

La Belgique sur la bonne voie
Bien que nous ne sommes pas dans la même sphère financière que ces équipes du top mondial, on ne peut pas dire, d’un point de vue financier, que les choses ne se sont pas améliorées. Nous sommes en effet sur la bonne voie. Notre entraîneur national actuel est professionnel. Nous disposons, à présent, d’un kinésithérapeute, d’un préparateur physique, de bourses octroyées à certains de nos joueurs de 7, et d’un budget 7s national belge, vingt-cinq fois supérieur à ce qu’il a pu être. En effet, en regardant de plus près, l’histoire du rugby à 7 national belge, ces dispositions financières et humaines, étaient loin d’être présentes avant la nomination du rugby en tant que sport olympique, en 2009. De plus, la lecture des comptes des résultats des nations européennes, du deuxième tiers mondial (i.e. Portugal, Espagne, Allemagne,...), montre des budgets qui sont similaires aux nôtres, et nous pouvons que nous en réjouir.

Tout ne peut pas se réduire qu’à la question du budget
Si beaucoup de nations comme la Belgique, le Portugal, l’Espagne, l’Allemagne, ainsi que le gratin mondial, ont revu leur budget à la hausse, l’opposé est également vrai. Certaines nations se désinvestissent du 7, vers le XV, car elles ne sont plus à même de subventionner le XV et le VII. Par exemple, les Pays-Bas (ils ne participent plus au championnat européen de 7) et l’Ecosse (elle s’est retirée du Grand Prix Series 7s), ne peuvent plus se permettre budgétairement de participer aux compétitions européennes. En outre, la manière dont le budget est utilisé ainsi que les initiatives internes budgétisées ou pas, jouent aussi un rôle primordial. Gent (Buffalos), dans le football belge, avec son coach Vanhaezebrouck, en est le plus bel exemple. Se qualifier pour les seizièmes de finale de la Champions League, avec un si petit budget, comparé aux autres ténors européens, montrent bien que tout est possible.

Le chaînon manquant
Ce qui nous manque, c’est une formation de nos jeunes au jeu du 7, et ce dès le plus jeune âge. Mon expérience personnelle dans la formation de jeunes joueurs belges de 7 (12 à 18 ans), me fait penser que les bases techniques font défaut, par faute d’entraînements (ex : les équipes de jeunes, à l’étranger, s’entraînent jusqu’à quatre fois par semaine) et/ou d’une formation de qualité. Il est, en effet, important de les habituer au haut niveau et ce, d’une façon régulière. Le complexe d’infériorité psychologique, les retards techniques, tactiques et physiques, s’en feraient moins ressentir.

Je pense qu’une qualification pour les Jeux Olympiques passe par une telle opportunité de formation. Il suffit, d’ailleurs, d’écouter Mike Friday – ex-entraîneur de l’Angleterre, Kenya et l’actuel entraîneur des Etats-Unis -, célèbre formateur dans le milieu du 7s, pour en être convaincu. Depuis 2010, et l’arrivée de différents fonds financiers dans notre pays, il semble y avoir eu un réel manquement à ce niveau. A l’inverse, d’autres nations, tels que les USA, Canada, Kenya, forment leurs jeunes aux spécificités du 7 et ce, dès le plus jeune âge. Finalement, un championnat de 7 belge (par exemple, provincial), en continu, permettrait aussi aux joueurs de se développer de façon permanente. Ben Ryan (entraîneur des Fidji, première du World HSBC 7s Series) vient d’ailleurs d’appliquer ce système, au niveau de la fédération fidjienne.