William Van Bost. (Photo D.R.)

Je me doute que je ne suis pas le premier à te poser la question mais qu’est-ce-que cela fait de jouer pour le Rugby Club Toulonnais ?
D’abord, c’est une reconnaissance. La première fois que j’ai joué, j’ai pensé à plein de trucs, tout ce que j’ai fait avant, avec mon club. (il fait une pause) C’est un peu une reconnaissance pour Boitsfort et mes coachs (NDLR : Laurent Oosters et Antoine Plasman) car je n’aurai jamais pu être là sans eux. Antoine m’a même accompagné à Toulon pour passer les tests !

C’est déjà une réponse de pro !
(il rigole) Il y a encore du chemin à faire mais quand j’ai vu que Toulon était intéressé par moi, je ne peux pas le cacher, j’étais fier mais je ne suis pas encore pro.

Mais c’est ton ambition ?
Oui, clairement.

A quel poste ?
Troisième ligne.

Quel est ton idole ou le joueur qui t’inspire ?
Je n’ai pas d’idole mais j’aime bien Kieran Ritz (NDLR : 3ème ligne centre de la Nouvelle-Zélande, très complet. Au niveau du comportement, c’est Thiery Dusautoir (NDLR : flanker et capitaine de l’équipe de France) car il est toujours là alors qu’il vieillit, tout en étant toujours humble en dehors du rugby.

Et toi, quelles sont tes qualités ?
Je crois que j’ai toujours envie de mieux faire. Après chaque match, je repasse le match dans ma tête et quand j’ai loupé un truc, ça m’énerve. L’entraînement suivant, il faut que je corrige mon erreur.

Tu joues en cadet Gaudermen, soit en moins de 16 ans. Si j’en juge par ton ambition, tu souhaites sans doute faire quelques matchs en U17 ?
Disons que ce n’est pas trop envisageable. Le surclassement à Toulon est assez compliqué. Souvent, quand les joueurs sont très forts, ils vont quand même essayé de les garder dans leur catégorie d’âge pour qu’ils amènent un plus à l’équipe.

Tu as signé au RCT à 14 ans. N’as-tu pas songé à passer par le centre de formation de Liège, certes moins prestigieux mais plus près de ta famille ?
C’est un débat que j’ai eu quasiment tous les soirs avec mes parents, mon frère et mes cousins. Mais mon papa m’a toujours dit « l’occasion de Toulon ne peut pas se répéter, il serait bête que tu es des regrets ».

Avais-tu néanmoins entrepris des démarches auprès du pôle à Liège ?
J’avais été en contact avec Sébastien Guns du pôle de Liège.

Avais-tu été approché par d’autres clubs français ?
Oui et la piste la plus sérieuse fut Massy mais je n’ai pas beaucoup hésité bien qu’ils m’aient proposé d’intégrer leur centre de formation. Mes parents ne voulaient pas que je parte à Paris. Massy, c’est banlieue parisienne…


(Photo D.R.)

Pourtant, cela aurait été plus simple vis-à-vis de tes parents ?
En effet, j’avais discuté avec un dirigeant qui m’avait dit que j’aurais pu prendre rentrer chaque week-end où je n’avais pas de compétition.

Tu ne sembles pas regretter ton choix ?
Non aucun regret. Au niveau de l’encadrement, les coachs sont bons et expérimentés. Et, je m’entends bien avec ma famille d’accueil.

Quel est le profil de tes coéquipiers ? Sont-ils originaires de toute la France voire de l’étranger comme toi ?
Non, ils habitent non loin de Toulon, 30 minutes maximum. Il y a seulement mon colocataire à l’internat, la semaine, qui habite à Roman, environ trois heures de route de Toulon.

Tu as probablement un surnom. Laisse-moi deviner : le Belge ?
Oui, pas trop original mais cela se passe bien avec mes coéquipiers.

Ont-il été surpris quand ils ont découvert ta nationalité ?
Ils ont tous changé de tête ! J’ai évidemment eu droit aux blagues des Français sur les Belges mais en même temps, pour mon premier match, ils ont pris du recul pour me présenter.

As-tu été surpris par cet état d’esprit ?
Franchement, je m’attendais à autre chose, que les gens n’allaient pas vraiment s’aimer car c’est un grand club, chacun voudra gagner sa place. En fait, l’équipe est soudée.

Et les résultats sont-ils aussi bons que l’ambiance ?
Nous sommes premiers de la poule. Nous avons tous gagné à l’exception d’un match perdu sur tapis vert car il y avait trop de joueurs mutés sur la feuille de match.

Ton intégration semble parfaite. Pas de point négatifs ?
Si au début, je pensais que mes parents n’allaient pas me manquer mais une fois que je les ai vus partir, cela a été dur. Il faut gérer seul ses études et la solitude comme au moment de la rentrée au Lycée.

Parviens-tu à garder contact avec tes anciens coéquipiers ?
Oui, cela a quand même été mes amis pendant 4-5 ans.

A quoi t’attendais-tu au niveau rugby en rejoignant Toulon ?
Je m’attendais à que ce soit intensif mais finalement, c’est plus intense qu’à Boitsfort mais ce n’est pas choquant. En fait, les exercices ne sont pas forcément très différents mais tu dois être à 100%.

Au niveau technique, as-tu beaucoup appris ?
C’est souvent dans le détail. Par exemple, ils veulent que l’épaule de percussion soit dans le sens du jeu pour faciliter la continuité du jeu debout. Pour les libérations de balle, on doit essayer d’être le plus souvent en « I » c’est-à-dire qu’on doit tomber verticalement avec les pieds vers l’adversaire et les mains vers son camp. On travaille aussi énormément les touches et les mêlées.


(Photo D.R.)

Tout le monde est appliqué ?
Je n’ai pas souvenir d’un entraînement où c’était n’importe quoi. C’est ce que j’aime bien dans ce club : tout le monde est très concentré. Quand il y en a qui sort du rugby ou qui parle, les autres le recadrent en lui disant de se donner à fond car il est à l’entraînement !

Ne penses-tu pas que l’implication est liée à la concurrence ? Combien de joueurs êtes-vous ?
Il y a un noyau de 35-40 joueurs et chacun d’entre eux veut entrer dans les 23 chaque week-end. Donc tu dois gagner ta place à l’entraînement

Est-ce une des raisons qui t’a poussé à quitter le championnat belge ?
Oui, parfois nous étions seulement 20 à Boitsfort.

As-tu accès à l’équipe senior du RCT, championne d’Europe en titre ?
Oui via le centre d’entraînement de Berg on les croise et ils nous disent toujours bonjour. Au joug, nous nous faisons entraîner par les joueurs qui reviennent de blessure ou peu utilisés et les buteurs sont entraînés par Wilkinson ou Michalak !

Quand on rencontre des professionnels, on est généralement frappés par la dimension physique, un côté surhomme. Cela te paraît accessible ?
Oui, il faut juste travailler. S’ils sont si musclés ce n’est pas parce qu’ils sont restés à jouer à la PlayStation chez eux. Ils ont appris en s’entraînant, en ne lâchant rien.

D’après toi, qu’est-ce-qui manque en Belgique ?
Plus d’entraînements, plus de moyens.

Es-tu payé ? Ou à défaut défrayé pour certains frais tels que les déplacements ?
Non, quand je souhaite rentrer, ce sont mes parents qui paient.

Combien de fois t’entraînes-tu chaque semaine ?
Nous avons quatre entraînements. Le lundi, c’est de l’endurance ou de la récupération – dépendamment si nous avons joué le samedi ou le dimanche - puis technique de passes. Le mardi, c’est musculation et mêlées ou touches. Le mercredi, nous avons une séance complète : musculation, physique et jeu. Enfin, vendredi, c’est une mise en place et révision des touches.


(Photo D.R.)

Vous visez le titre ?
Au sein des joueurs : oui. Mais, on sait que ce sera dur et que cela dépend de plein de choses. Moi, je suis toujours parti du principe qu’en visant la lune, on retombe sur les étoiles.

Vous êtes donc aussi ambitieux que vos aînés et prêts à affronter les grosses écuries du Top 14 ?
Non, c’est différent. On peut imaginer qu’une année Mont-de-Marsan soit énorme et gagne le titre. Ce dont on parle cette saison, pour le moment, c’est Agen, Toulouse toujours, Clermont.

Avais-tu eu le réflexe de regarder les performances de ta génération au cours des saisons précédentes avant de signer ?
Oui et on m’a dit que les joueurs nés en 1998, c’est un bon groupe et leurs ambitions. Qui est d’aller le lus loin possible en championnat de France

C’est certainement prématuré de te poser la question mais tu sembles si bien intégré que je ne résiste pas à te demander si tu recommanderais à d’autres jeunes joueurs belges de ta génération à tenter l’aventure en France ?
Oui, encore que cela ne dépend pas, que de sa propre envie, il faut voir l’avis des parents. Je sais que j’ai eu une énorme chance d’avoir des parents qui m’ont laissé partir à 15 ans, en sachant que je les verrais toutes les trois semaines quand ils viennent et sept semaines quand ils ne viennent pas. C’est un choix. Ensuite, il faut se donner les moyens de réussir et bosser.