(Archive Sportkipik.be)

D’où vient l’idée de Sportkipik ?
J’ai commencé en 2000 alors que j’étais encore étudiant en journalisme. C’était les débuts d’internet, j’ai décidé de faire un site qui traite des sports moins médiatisés.

Quels étaient ces sports ?
Le hockey sur gazon qui n’était pas encore sport olympique, le rallye, le basket, le foot féminin et le rugby.

A cette époque, que représentait pour toi le rugby ?
C’était un sport encore mystérieux. J’habitais à Boitsfort. Je voyais souvent l’affiche « Boitsfort champion » à l’épicerie du coin mais tout en connaissant bien ma commune, je ne savais pas où ils jouaient.

Couvrir cinq sports : sacré pari ?
J’ai commencé avec un ami. Nous sommes allés photographier des matchs de rugby et de hockey. C’était aussi le début du numérique. A force, nous nous sommes pris au jeu.

Aujourd’hui, Sportkipik se consacre uniquement au rugby. Pourquoi le rugby s’est-il imposé ?
C’est avec le rugby que nous avons eu le plus de retours et le plus de visites sur le site. Au fil des semaines, au fil des mois, nous parlions de plus en plus de rugby.

Reste ce nom un peu étrange pour un site dédié au rugby ?
Oui.

Songes-tu d’ailleurs à le changer ?
On y a déjà pensé en intégrant le mot rugby mais sportkipik est devenue une marque bref nous n’avons toujours pas franchi le pas.

Qui se cache derrière ce « on » ?
Moi et mon père.


(Archive Sportkipik.be)

Ton père est un ancien joueur de rugby ou un journaliste ?
Ni l’un, ni l’autre. C’est un graphiste, passionné de photographie. Je lui ai demandé de m’aider au début et, de fil en aiguille, il s’est pris au jeu et s’est fait des amis dans le rugby.

Aujourd’hui, ce site fait vivre la famille Verscheure ?
Non, absolument pas ! Mon père a choisi de m’offrir beaucoup de temps pour participer à l’aventure, constatant que ma passion me prenait beaucoup de temps. Cependant, ce qui me fait vivre ce n’est pas sportkipik mais une activité professionnelle pour laquelle je suis salariée.

Deux, cela paraît difficile à croire ?
Au départ, il y avait mon père, mon ami et moi. Mais mon ami a lâché prise car étant bénévoles, cela devenait un projet un peu fou qui commençait à prendre beaucoup trop de temps.

Combien de temps passes-tu chaque semaine sur le site ?
Si je devais calculer les heures avec mon père, c’est un temps plein, 40 heures minimum par semaine !

Et comment tu gères avec ta copine et tes enfants ?
J’avais déjà lancé le site depuis quelques années quand j’ai connu ma copine. Elle sait à quoi s’en tenir mais je t’avoue que ça devient de plus en plus compliqué avec le temps de négocier entre une sortie entre amis avec elle le dimanche et la couverture d’un match. Quant aux enfants, j’y pense, mais le site est pour moi un bébé qui me prend tout mon temps !

Quiconque s’intéresse au rugby en Belgique, consulte sportkipik. Au total, combien sommes-nous ?
Pendant la saison, le site enregistre 100 000 visiteurs par mois dont plus de 30 000 visiteurs uniques !

C’est bien plus que le nombre de licenciés !
Effectivement et nous en sommes très fiers.


(Archive Sportkipik.be)

Quelles ont été les grandes étapes du site ?
Quand nous avons eu 100 visites par jour, nous avons débouché le champagne en nous disant : « t’imagines si on réunit cent personnes dans la même pièce ? Tout ce monde qui vient lire nos résumés, qui vient voir nos photos ». Puis, chaque année, le nombre de visites à augmenter. Quand nous avons atteint 2000 visiteurs par jour, on s’est dit « c’est dingue, c’est presque autant qu’un match de football ». A cette époque, on se payait avec la reconnaissance. Nous étions fiers.

Et aujourd’hui, la reconnaissance suffit-elle à te motiver chaque jour ?
Nous sommes arrivés à un point où modestement, nous nous disons que ce qu’on fait est bien. Nous avons la reconnaissance des joueurs, des entraîneurs et des passionnés mais on a l’impression parfois d’être pigeons dans l’affaire.

Ah bon ?
Cela fait 14 ans que nous gérons ce site. Nous avons montré que nous étions dévoués et travailleurs, motivés et passionnés. Tout le monde est reconnaissant et souvent même, on nous a dit : « heureusement que vous êtes là, vous avez contribué au développement du rugby belge ». Mais, au final, on se dit qu’on n’y gagne pas grand-chose...

Tu sembles victime de ton succès ?
Oui, en quelque sorte.

Envisages-tu d’arrêter ?
Nous avons déjà pensé à arrêter le site mais je dois avouer que nous n’avons pas encore eu les couilles de le faire.

Si tu n’es pas prêt à arrêter et c’est tant mieux, que prévoies-tu ?
J’ai besoin rapidement de compléter l’équipe éditoriale. Mon travail est de plus en plus exigeant. Il m’amène notamment à travailler le week-end, ce qui rend de plus en plus difficile à la fois la couverture des matchs que les mises à jour quotidiennes du site. Mais ce qui me tracasse également, c’est que mon plus proche collaborateur, mon père, avance maintenant en âge. Il ne me le dit pas mais quand il couvre plusieurs matchs par week-end, des tournois, aux quatre coins de la Belgique, les temps de « récupération » sont plus longs !

N’es-tu pas déjà soutenu par Bofferding ?
Oui effectivement depuis trois saisons, nous avons Bofferding qui nous aide et en retour nous les aidons. C’est un soutien et je les en remercie mais cela ne suffit pas.

Pour quelles raisons ?
Comme je te l’ai dit, mon but n’est ni de m’enrichir, ni de partir en « vacances » sur le dos du rugby, mais d’augmenter le nombre de collaborations régulières. J’aimerais aussi pouvoir acheter du matériel de meilleure qualité et récompenser les personnes qui contribuent déjà au site.


(Archive Sportkipik.be)

Donc, tu as déjà une petite équipe ?
Depuis des années, il y a des personnes qui nous envoient ponctuellement des comptes rendus de match ou des photos, bénévolement. C’est sympa, je les en remercie mais j’aimerais bien pouvoir leur donner quelque chose en échange, même symbolique.

Tu travailles au numérique ?
Oui, la création du site a correspondu au début du numérique. Avec un simple appareil bridge numérique, nous étions à la pointe. Aujourd’hui, on voudrait bien acheter une meilleure caméra vidéo, un meilleur appareil photo mais ça coûte cher du matériel de ce type, plusieurs milliers d’euros que nous n’avons pas. Je t’avoue que je ne vais pas encore investir plus d’argent de mes fonds propres !

Ce qui surprend, c’est qu’en dépit de tes faibles moyens, tu restes toujours à la pointe : Twitter, Facebook, Vidéos... Quel est le prochain projet ?
Nous comptons prochainement décerner les Magritte du rugby belge.

Qui seront concernés ? Comme les Oscars Midol : joueurs et entraîneurs ?
Sorry mais comme le nom définitif, c’est un peu tôt pour te donner tous les détails car nous sommes en train d’élaborer les catégories et de discuter avec des partenaires mais l’idée est de rassembler la famille du rugby que nous suivons avec plaisir toute la saison. Une chose est sûre, les filles seront aussi concernées et sans doute le Seven.

Aujourd’hui, tous les sites d’information cherchent la bonne formule, le modèle économique durable. Envisages-tu de rendre le site payant ?
Comme pour le changement de nom du site, nous y avons pensé en effet, il y a trois ans. La formule consistait à rendre le site accessible pour deux euros/mois avec une petite partie du contenu en accès libre permanent. L’idée était de payer nos déplacements, rémunérer les contributeurs… Mais nous n’avons pas osé de peur d’entacher notre réputation et passion pour ce sport. Depuis ses origines, ce site est ouvert à tous, aussi bien aux contributeurs qu’aux lecteurs.

Quelle relation as-tu avec la ligue et la fédération ?
J’ai des bonnes relations, à tel point que régulièrement nous recevons des mails de joueurs, parents, spectateurs qui nous prennent pour la VRB, LBFR ou FBRB en nous demandant des informations sur des matchs, le lieu d’un tournoi, comment entrer une licence… Dès le début, nous avons été bien accueillis mais mis à part au niveau de feu notre magazine Rugby’s Spirit publié durant deux-trois ans avec la Ligue, on ne peut pas parler de grande collaboration. Nous ne sommes pas le média de la Ligue ou de la Fédération.


(Archive Sportkipik.be)

Hormis l’arrivée récente d’EKTV qui reste essentiellement cantonné à une couverture télé des matchs de haut niveau, tu es le seul média qui traite en profondeur de l’actualité du rugby en Belgique. N’as-tu jamais considéré le fait de te mettre sous le giron de la Fédération en signant un accord avec elle pour peut-être en vivre ?
Cela a été quelque fois discuté mais l’idée n’a jamais totalement été approfondie. Nous ne sommes pas bilingues par exemple. Nous dérangeons peut-être, parfois, également. On ne sait pas ce qui se passe en coulisses. D’un autre côté, même si nous ne recherchons pas le sensationnalisme, devenir le site officiel de la Fédération, c’est perdre son indépendance.

Justement, quelle est la ligne éditoriale de ce www.sportkipik.be ?
C’est montrer la vie du rugby.

Du rugby « belge » ?
Oui belge. Nous ne traitons pas l’actualité du rugby international car d’autres le font mieux que nous. J’ai autant de plaisir de parler d’un match au sommet, d’une finale de championnat qu’un match de régionale. J’aime montrer ce qui se passe, ne pas tomber dans la facilité. Par exemple, si un arbitre est dans un mauvais jour, nous le mentionnerons mais sans polémiquer ! Donc, finalement, notre ambition c’est faire la promotion de notre rugby.

Quelle part de réussite t’attribues-tu par rapport au développement du rugby belge ?
Je ne dirais pas que grâce à nous le rugby belge s’est aussi bien développé mais que nous avons été un élément qui l’a facilité.

Après coup, regrettes-tu de ne pas avoir joué au rugby ?
Le terme est peut-être un peu fort car je suis très heureux aujourd’hui mais j’aurais apprécié découvrir le rugby plus tôt, pour jouer.

Etais-tu sportif ?
J’ai toujours aimé tous les sports, même le lancer de savates, le jet de chaussettes… mais j’ai vraiment été frappé au début, comme tout le monde, par l’engagement physique pendant le match, qui s’arrête au coup de sifflet final. Tous les clichés m’ont touché. Aussi, sans être d’un parti pris, quand je vais voir un match, je vibre. J’espère chaque fois que le match sera bon, un chouette combat d’avants, des envolées d’arrières…


(Archive Sportkipik.be)

Vibres-tu toujours autant, aujourd’hui ?
Oui et c’est encore plus facile quand je vais voir l’équipe nationale car je peux être supporter ! Je n’ai pas besoin de voir cinquante essais par match pour trouver un match plaisant. Même de petits duels entre joueurs, qui se toisent, durant un match et tant que cela reste dans la règle, j’adore.

J’avais raison, t’as un peu de regret ?
Oui effectivement, de ne pas avoir connu cela de l’intérieur. Peut-être que si le rugby avait été plus médiatisé quand j’étais jeune, j’en aurais fait car j’ai touché au football, basket, tennis, aïkido.

Est-ce-que le milieu du rugby t’a reproché de ne pas être un des leurs ?
Non ou alors dans mon dos.

Rassure-nous pour terminer, le site Sportkipik est bien là pour durer ?
Je n’envisage pas d’abandonner mais sans sponsoring sur le site, direct ou indirect, cela va être compliqué.